L’échec du sergent à grosse tête
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sergent ouamrane

Dans un quart d'heure, minuit. Ouamrane (à gauche), l'adjoint de Krim Belkacem, est prêt à l'attaque. Devant lui, l'objectif : la caserne de Boufarik, sur la route de Blida. A quelques mètres, tapis dans l'ombre, une centaine d'hommes, des Kabyles comme lui, qui ignorent tout de la région. Les militants recrutés par Rabah Bitat, le chef de l'Algérois, se sont dégonflés au dernier moment. Il a fallu faire venir près de deux cent cinquante hommes de Krim Belkacem pour que la Mitidja, bastion de la colonisation française, pût participer au premier jour de la révolution.
Car Ouamrane se prépare à en donner le coup d'envoi. L'heure H est fixée à minuit. Il fait un large geste du bras. Ses hommes avancent avec précaution dans l'orangeraie qui entoure la caserne. Encore quelques minutes. Ouamrane a tout préparé. Au poste de garde, le caporal-chef Saïd Ben Tobbal doit leur ouvrir la porte. Il est prêt à déserter ! Autant qu'il livre le magasin d'armes avant de gagner le maquis!
Aux alentours de Boufarik plusieurs équipes de saboteurs doivent détruire les ponts qui franchissent les oueds et relient la petite ville à Blida, l'Alba et Alger, pour parachever la psychose de terreur chez les Européens. Les explosions ne devront se produire que vers 0 h 30. Après l'attaque de la caserne.

ouamrane et le maquis fln

23 h 55. Une explosion plaque Ouamrane à terre. Une deuxième, puis une troisième trouent le silence de la nuit. En un éclair, le chef kabyle a compris. Les saboteurs, pris de panique, ont fait exploser leurs engins avant l'heure prévue. D'un cri, il lance ses troupes en avant. L'explosion a donné l'alerte au poste de garde. Un projecteur s'allume sur le mirador et balaie l'orangeraie. Ouamrane avec son commando vers l'entrée de la caserne. Deux sentinelles sont assommées. Ils entrent dans le poste de garde et braquent leurs armes sur les soldats stupéfaits : « Haut les mains ! Ne bougez pas. »
Le caporal-chef Saïd Ben Tobbal se joint aux agresseurs. Ses camarades français ont compris et lèvent les bras. Il rafle les armes et les passe aux hommes d'Ouamrane : quatre mitraillettes et six fusils. Il faut s'en contenter car il est trop tard pour tenter de piller le magasin d'armes. Les explosions ont bouleversé le plan mirifique gambergé par le sergent à grosse tête, comme on appelle Ouamrane dans les maquis kabyles.
Comme une volée de moineaux, les rebelles s'égaillent dans l'orangeraie. Certains lâchent des rafales d'armes automatiques. Ouamrane glisse dans sa ceinture le pistolet autrichien à canon long qui ne l'a jamais quitté depuis sept ans qu'il tient le maquis en Kabylie. Il ne lui servira pas aujourd'hui.
Pour le commando Ouamrane, c'est l'échec. Tant de risques pour dix armes! Le chef, à l'aube de ce ler novembre 1954, n'a qu'une pensée : rejoindre sa Kabylie pour y poursuivre le combat. Avec des hommes sérieux, et qui connaissent le terrain!

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